Mener depuis le front

People talking at a meeting Frontline AIDS/Gemma Taylor 2018
Emmanuel Ndlangamandla, executive director of CANGO in Eswatini, speaking at a meeting of Frontline AIDS partners

À l’approche de la plus grande conférence Africaine sur le VIH, trois partenaires de Frontline AIDS expliquent pourquoi les partenariats sont plus que jamais nécessaires pour soutenir la réponse au VIH.

Plus de 100 organisations de la société civile composent le partenariat mondial de Frontline AIDS et sont de toutes formes et de toutes tailles. Mais ce qui les unit, c’est que chacune de ses organisations est un leader à part entière.

Prenons l’exemple de Coordinating Assembly for NGOs (CANGO) d’Eswatini qui, bien qu’étant une organisation relativement petite, est bien au-dessus de son poids en étant un réseau pour environ 70 ONG travaillant sur le VIH, le genre, les enfants et les jeunes, la sécurité alimentaire et la nutrition, les maladies non transmissibles, et la santé et les droits sexuels et reproductifs (SRHR).

Ou encore REPSSI, basé en Afrique du Sud, qui travaille dans toute la région pour intégrer le travail psychosocial dans le secteur du développement, notamment dans les programmes de lutte contre le VIH, la protection des enfants et la violence basée sur le genre. REPSSI et CANGO sont tous deux partenaires du portefeuille du programmes READY, conçus par des jeunes et axés sur leurs besoins.

Sans oublier les partenaires de longue date comme Alliance Nationale des Communautés pour la Santé (ANCS) qui a été créée pour soutenir et renforcer la réponse communautaire au VIH au Sénégal et qui, comme CANGO, est un bénéficiaire principal du Fonds mondial.

Ici, le directeur technique de l’ANCS, Massogui Thiandoum, le directeur général de REPSSI, Patrick Onyango Mangen, et le directeur exécutif de CANGO, Emmanuel Ndlangamandla, expliquent pourquoi il est plus important que jamais de faire partie de partenariats comme Frontline AIDS, en particulier pendant la période d’impact du COVID-19.

Se tirer mutuellement vers le haut

Massogui: Le partenariat Mondial de Frontline présente des avantages à plusieurs niveaux. Tout d’abord, il représente une masse critique de praticiens qui peuvent contribuer à accélérer la réponse mondiale au VIH. Deuxièmement, en partageant nos connaissances, notre expertise et nos expériences, nous pouvons être beaucoup plus efficaces et efficients dans nos interventions. Troisièmement, nous sommes aussi une force contributive à écouter qui peut influencer les décisions au niveau international et mondial.

Emmanuel: Le modèle de partenariat est très intéressant car il crée un sentiment de sécurité. Même si je viens d’un très petit pays, je suis à l’aise pour travailler avec des acteurs plus conséquents. En exprimant nos points de vue, nous ne nous sentons pas inadéquats. Il y a cette idée de se tirer mutuellement vers le haut, c’est l’essence même du partenariat.

Patrick: Nous préférons les partenariats où nous affinons nos compétences, acquérons et échangeons de nouvelles connaissances. Et avec Frontline AIDS, nous avons le sentiment, que notre contribution est appréciée, que nous sommes suffisamment consultés lors de l’élaboration des programmes, et qu’il y a un échange d’informations qui est vraiment important pour nous en tant qu’organisation basée dans le Sud.

Garder la mobilisation

Patrick: Il est important de continuer à mettre en avant les problèmes liés au VIH qui sont encore immenses. En ajoutant à cela la pandémie COVID-19, les familles sont affaiblies. Nous devons garder la mobilisation autour du VIH et continuer à le mettre dans l’agenda mondial.

Massogui: COVID 19 nous a permis de voir plus clairement les inégalités au sein du système de santé et leur impact sur certaines populations. De nombreux bailleurs ont adapté leurs mécanismes de financement pour que nous puissions faire face à l’urgence des situations qui se sont développées à cause de COVID-19. Mais l’une des conséquences est que les fonds destinés à la lutte contre le VIH ont été affectés à COVID-19, ce qui crée un vide. Il faut donc mobiliser beaucoup plus de ressources pour pouvoir répondre à l’épidémie de VIH et se préparer aux futures pandémies.

Emmanuel: Pendant COVID-19, le partenariat de Frontline AIDS a recueilli des informations sur le terrain afin d’apporter des données pour le plaidoyer et engagement avec les décideurs politiques au niveau mondial. Il est essentiel de continuer sur cette voie. Nous devons nous assurer que les ressources sont toujours là pour la réponse au VIH afin que l’action soit durable.

Une voix plus forte

Emmanuel: Nous [à CANGO] travaillons dans un très petit pays, mais nous atteignons maintenant l’espace mondial. En soi, c’est enrichissant car nous contribuons également à une meilleure compréhension des questions liées au VIH, comme l’impact qu’il a sur les jeunes filles et les adolescents, et les questions de discrimination, en particulier pour la communauté LGBTI.

Massogui: Nous devons renforcer notre visibilité. Les bailleurs et autres parties prenantes doivent être en mesure de voir notre vitrine, pour ainsi dire, afin d’apprécier le dynamisme et la force du partenariat. Cela nous aidera à défendre nos intérêts au niveau national et à mieux servir les communautés.

Patrick: Ce partenariat accroît notre visibilité dans le secteur et nous permet d’atteindre différentes parties prenantes qui, jusqu’à présent, n’auraient pas eu connaissance de ce que nous faisions.

Emmanuel: Le modèle de partenariat nous a appris que nous devons établir des relations avec les syndicats, avec les communautés religieuses, avec les populations clés, avec les jeunes. Lorsque nous travaillons ensemble, nous avons une voix plus forte. Si nous apportons des données, les décideurs politiques ne peuvent pas contester notre appel au changement.

Leadership partagé

Patrick: Frontline AIDS reconnaît REPSSI comme un leader dans le domaine de la santé mentale et du soutien psychosocial et nous considère comme tel. L’approche adoptée est consultative et inclusive. Elle est lente mais délibérée et permet de s’assurer que, lorsque nous nous dirigeons vers des structures de partenariat plus établies, tout le monde est d’accord avec le processus.

Massogui: Le modèle de leadership partagé indique une évolution du partenariat car, au début, nous étions redevables à Frontline AIDS. Maintenant, nous sommes un acteur de même niveau, nous partageons donc les rôles et les responsabilités au sein de la stratégie globale. Cela nous donne le sentiment d’être valorisés car nous sommes dans un partenariat égalitaire.

Emmanuel: Le leadership partagé vient de la prise de conscience que dans les différentes parties du monde où nous opérons, nous sommes aussi des leaders dans notre propre espace. En tant que CANGO, je suis un leader, j’ai de l’influence. Nous sommes respectés par le gouvernement, par les bailleurs, par l’ONU et par d’autres. Avec cette influence, de la micro à la macro, en le regroupant cela une influence encore plus grande.