Comment #blacklivesmatter a ravivé ma passion à ‘faire le développement autrement’

Frontline AIDS / Tony Kawimbe / Arete 2020
Jomell M’hango, a 28 year old DZL client, walks through his community in John Laing Compound, Lusaka Zambia

Divya Bajpai, Directrice : Programmes à Frontline AIDS, donne son point de vue sur la façon dont le mouvement actuel pour l'égalité raciale pourrait être transformateur pour les organisations travaillant dans le développement international.

La “décolonisation du développement” est-elle la nouvelle mode sur laquelle se jette le secteur du développement international ? Ou s’agit-il d’une véritable réponse au mouvement Black Lives Matter et d’une tentative de remise en question de l’héritage postcolonial et des structures politiques et financières qui sous-tendent l’industrie de l’aide”?

En tant que femme d’origine Indienne, qui travaille dans le domaine de la santé mondiale et du développement depuis plus de 20 ans, c’est une préoccupation actuelle pour moi. Je vis, avec d’autres collègues noirs et de couleur, un processus de changement à travers des conversations profondément émotives sur notre secteur et nos diverses expériences de vie et de travail en tant que minorité.

Cette préoccupation et cet esprit critique me font souvent sentir vulnérable, mais me renforce aussi dans ma conviction que nous devons faire quelque chose de significatif et authentique dans notre travail. Nous devons remettre en question le statu quo et contribuer à façonner une nouvelle façon de faire du développement autrement.

J’ai commencé ma carrière dans le domaine de la santé mondiale et du développement international à Frontline AIDS (anciennement l’Alliance internationale contre le VIH/SIDA) en 1998. Au cours de mes études universitaires de troisième cycle, j’étais très critique à l’égard de l’aveuglement du secteur du développement. Cependant, l’expérience que j’ai acquise au cours des premières années de notre organisation et de la riposte au sida était sous-tendue par la ferme conviction que les solutions ne viennent pas du Nord et ne sont pas imposées par cette puissance. Les individus et les communautés locales dont les vies ont été la plus touchée par le VIH doivent diriger et définir l’agenda de la réponse au sida, avec le soutien des organisations nationales de la société civile.

Le changement de paradigme de cette conviction et de cette approche m’a inspiré dans mon travail pendant plus de vingt ans et, d’une certaine manière, m’a éloigné de mes préoccupations antérieures concernant la race.

CRÉER DES RELATIONS DE CONFIANCE

J’ai passé les 20 dernières années à essayer de créer des relations de confiance et de respect mutuel avec nos partenaires, basés en Asie, en Afrique et en Amérique latine. J’ai travaillé avec des collègues pour aider à mettre en place des organisations nationales de la société civile, ainsi que des bureaux nationaux qui ont fait la transition pour devenir de puissants acteurs indépendants de la société civile nationale. J’ai aidé des partenaires nationaux à accueillir des centres régionaux de soutien technique et à devenir des centres de pratique technique en matière de VIH, à l’origine d’un leadership dans le Sud.

Je suis maintenant impliqué dans la prochaine étape de Frontline AIDS vers la co-création d’un partenariat mondial de la société civile où le pouvoir et le leadership sont véritablement partagés. Cela signifie qu’il faut tenir compte des différences culturelles dans les méthodes de travail et offrir un espace égal à tous, quelle que soit la taille ou la situation géographique de l’organisation.

De manière cruciale, cela signifie également que le pouvoir et le leadership ne sont pas informés ou médiatisés par les flux financiers du “Nord” vers le “Sud”, qui renforcent souvent les hiérarchies de pouvoir ancrées dans notre travail. Cela peut conduire à des compromis, et là où Frontline AIDS aurait conventionnellement dirigé un consortium d’organisations partenaires pour réaliser une activité, cela peut ne pas être automatiquement le cas.

Tout cela est possible et commence à se produire grâce aux relations de confiance de longue date de Frontline AIDS, construites sur les hauts et les bas de collaboration pour fournir des programmes avec un sens aigu des valeurs partagées et de l’engagement à mettre fin au SIDA pour tous, partout dans le monde.

CO-CREER UN NOUVEL MODEL DE PARTENARIAT

En 2019, Frontline AIDS s’est engagée avec ses partenaires pour passer à l’étape suivante, pour que le partenariat soit plus ouvert et inclusif, sur la base des fondements de la confiance, de l’action conjointe et de la solidarité construits au cours des 27 dernières années. En tant que partenariat, nous prenons des mesures pour co-créer des échanges horizontaux et multidirectionnels de connaissances et de ressources, avec un éventail diversifié d’acteurs de la société civile, indépendamment de leur localisation géographique.

Dans ce processus de co-création avec les partenaires, une aspiration commune pour le partenariat doit émerger parmi le personnel de Frontline AIDS et le conseil d’administration international. Des conversations sensibles ont eu lieu sur ce qui peut potentiellement être perdu lorsque nous passons d’un modèle centralisé d’un “secrétariat” au cœur du partenariat au service de nos partenaires, à un modèle où tous les partenaires, y compris Frontline AIDS, sont des partenaires égaux. De nombreuses questions ont été et continueront d’être posées sur le processus de co-création d’un nouveau modèle de partenariat, qui inclut un mécanisme de responsabilité partagée du partenariat. Comment le secteur, nos donateurs, conseils d’administration respectifs et le secteur vont il réagir à cela?

Les organisations du partenariat doivent également être prêtes à avoir des conversations difficiles les unes avec les autres. Tout cela fait partie du processus de co-création. Avec mes compagnons de route de Frontline AIDS et des organisations partenaires, je suis remplie d’espoir que nous pouvons franchir ensemble ces étapes courageuses.

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